Pearl Jam -
GigatonPearl Jam is back.
J’avais fini par me dire que ça sentait le sapin. Presque 7 ans d’attente depuis un
Lightning Bolt simplement plaisant.
Des concerts toujours fantastiques, longs, denses mais puisant largement dans le passé du groupe,
Pearl Jam faisant depuis longtemps partie de ces groupes qui n’ont plus besoin de sortir du neuf pour remplir un stade.
Des annonces de normands qui bottent en touche quand des journalistes leur demandent les avancées du prochain disque. Un
Vedder qui, même s’il ne sort pas de nouveau disque en son nom, organise d’importantes tournées mondiales, seul, à un prix contestable et les autres sbires qui s’occupent différemment.
Ament dessine des planches de skate, sort un nouveau disque,
McCready fait rugir sa vieille Fender avec les copains,
Gossard distribue des prospectus à la cause environnementale dans les rues de Seattle.
Les news sont maigres voire risibles pour les fans.
L’impossibilité ou l’envie commune de se retrouver est palpable.
Un simple titre
Can’t Deny Me probablement composé sur un coin de table en guise d’attente, il y a 2 ans, un gentil brûlot convenu contre l’imprévisible rouquin de la maison blanche.
Puis une info est relayée, une photographie
Ice Waterfall d’un certain
Paul Nicklen, biologiste et photographe animalier canadien, est placardée dans des endroits retirés de grandes villes mondiales, sous forme d’une carte au trésor, avec l’inscription dissimulée dans un cardiogramme :
Gigaton !
Gigaton donc ! Fonte des glaces, cardiogramme, le message est clair.
Suivra rapidement la parution du premier single
Dance Of The Clairvoyants, fustigé ou adulé par les amateurs du groupe, mais proposant quelque chose de résolument nouveau, funk, groovy et dansant.
Un second single
Superblood Wolfmoon, sans doute balancé pour rassurer les fans de la première heure, titre punk à l’esprit pop, des accords en 5ème bien catchy, un chant joyeusement fédérateur et un solo grésillant de Mike.
La première idée qui m’est venue à l’écoute de
Gigaton, c’est sa simplicité apparente, son efficacité rapide mais qui ne sont qu’un leurre quand on s’y colle. Une écoute au casque en dit long sur le travail d’arrangement qui a dû donner lieu en studio à de belles prises de tête. Album de PJ pur jus mais avec sa dose d’ajouts, bidouillages, instruments inédits ou gimmicks bien placés qui vous transforment un titre plaisant en titre addictif (
Take The Long Way)
Gigaton est un album majoritairement pensé par
Vedder. Toutes ses lubies s’y retrouvent, de l’acoustique désireuse de liberté en pleine nature intothewildesque, sa passion pour le grattage de cordes à la
Pete Townshend (
Never Destination), le mimétisme parfois vocal avec le Boss (S
even O’Clock) ou encore le recyclage d’idées anciennes avec
Come Then Goes, savant breuvage prenant un peu à
Parting Ways, un soupçon de
Yellow Moon sur le refrain, le tout avec un son de gratte sèche plus blues et le tour est joué.
Oui mais non.
Vedder est le maître à bord depuis fort longtemps. On ne saura jamais si c’est une bonne chose. Que serait le groupe aujourd’hui si
Gossard ne s’était pas couché si vite ?
Vedder est le seul à pouvoir porter le groupe à bout de bras. PJ, c’est lui même s’il ne serait rien seul. Les autres ne sont pas interchangeables.
Et ils le prouvent clairement sur
Gigaton, ils sont présents sur chaque titre par leur vision singulière et libre de la musique, comme sur le fameux
Seven O’Clock qu’ils emmènent dans des contrées à cheval entre plénitude et fin du monde.
Et quand ils n’officient pas pour sublimer les compos de
Vedder, ils apportent également des contributions massives en terme de compositions.
Quick Escape est en le meilleur exemple sur
Gigaton,
Jeff Ament, bassiste de son état, se permet de convoquer
Jimmy Page et
Tom Morello à la barre (C’est une image, ne vous excitez pas) pour le titre résumant le mieux le bordel jamien cher à mon cœur.
L’époque
Ten et
Vs est loin et
Gossard n’y va que d’une seule signature, la berceuse
Buckle Up qui ressemble bien plus à ce qu’on retrouve dans ses albums solo qu’à du
Pearl Jam. Du
Gossard intimiste et profond qui dialogue en chanson avec son ennemi préféré.
McCready, quant à lui, est surtout présent et renversant pour la qualité de ses soli, il n’avait pas été autant présent dans ce registre depuis l’Avocado en 2006 et revient, quelque part, à sa fonction première au sein du groupe. Même s’il est nullement question d’oublier les pépites écrites jadis. (
Given To Fly,
Faithfull,
Present Tense, entre autres)
Quant à
Cameron, il est pour moi le grand monsieur de ce disque et semble avoir trouvé sa place, son jeu n’avait jamais été aussi varié, posé et fin depuis son arrivée en 98.
Gros coup de cœur pour son titre
Take The Long Way qui m’évoque la mémoire de
Chris Cornell, qui manque, sans aucun doute possible, à tout ce beau monde.
Dans la première vidéo commercialisée par le groupe en 1998,
Single Video Theory, retraçant les sessions de répétition de l’album
Yield,
Stone Gossard disait cette phrase « We sound like a band … again. »
22 ans plus tard, cette phrase refait sens. Il est manifeste que le groupe a remis plusieurs choses à plat, a dit au revoir à
Brendan O’Brien qui ne convenait peut-être plus à un groupe vieillissant à l’inspiration à conforter, a dû poser des questions et prendre le temps d’y répondre.
Malgré des crédits très favorables à
Vedder, on sent un groupe à l’unisson. Puisse t-on vérifier ça en live cet été si les évènements le permettent. Rien n’est moins sûr.