John Zorn LemmaIl m'était impossible de ne pas parler du mythe
John Zorn dans une de mes chroniques. Saxophoniste dans des groupes tels que
Masada,
Painkiller ou encore
Naked City,
John Zorn est peut-être un des musiciens les plus inclassables de ce vaste monde qu'est la musique. Après être passé à travers des centaines de disques par le jazz, le death-metal, le grindcore, le free-jazz, la musique expérimentale, le klezmer, la surf, j'en passe et des meilleurs,
John Zorn a toujours su innover et étonner les mélomanes qui le suivent. Et c'est une fois de plus le cas avec ce disque. Car si j'ai parlé des différents styles de musique qu'il pratiquait, j'en ai toutefois oublié un : la musique contemporaine. Et autant dire qu'il excelle dans ce domaine.
Dans Lemma ce n'est pas de grand orchestre dont il est question, mais simplement de trois violonistes :
David Fulmer,
Chris Otto et
Pauline Kim. Trois violonistes pour trois parties distinctes.
La première, réservé à la gente masculine, avec un duo de violons appelé
Apophthegms décomposé en en douze parties (ou miniatures) ne dépassant les trois minutes chacune mais formant un long morceau de plus de 20 minutes. Entre grincements d'archets et cordes frottées délicatement, entre passages complètement barrés et d'autres beaucoup plus calmes, les deux violonistes nous étonnent par leur virtuosité, que les cordes soient frottées, grattées ou pincées. Un très grande performance !
Le morceau suivant,
Passagen, longue pièce proche du quart d'heure fait la part belle à la violoniste
Pauline Kim, ici soliste. Son jeu nous dépayse, et à elle seule, elle réussit à nous stupéfier de par sa technique mais également de par sa folie. Vous n'allez pas voir les 15 minutes passer. Pour terminer ce disque, un morceau déjà connu car présent dans
Music and its Double (datant de 2011, ce qui correspond à une vingtaine de disques jusqu'à aujourd'hui chez Zorn) dans une version avec batterie :
Ceremonial Magic. Ici, c'est en violon solo qu'il est présenté, ce qui permet s'en saisir encore plus les subtilités de
David Fulmer. Dynamique et décousu sont les deux mots qui me viennent à l'esprit quand j'écoute ces 4 parties. Mais je ne dis pas ça péjorativement, bien au contraire. Cette sensation de "décousu" (car ce n'est qu'une sensation après tout, tout est très cohérent) sert à créer un suspens qui rend cette pièce encore plus angoissante que celle avec batterie. Et dynamique car certaines lignes répétées pendant plus d'une minute en deviennent hypnotisantes. Angoissant et hypnotisant sont les deux mots qui me viennent à l'esprit quand j'ai fini l'écoute de ces 4 parties.
Lemma n'est donc pas un album à conseiller à ceux qui veulent entrer dans l'univers
Zorn. Si c'est votre, préférez
The Gift,
The Dreamers ou encore
At The Moutains of Madness, d'
Electric Masada. Même les amateurs de musique contemporaine pourront être déconcertés par cet album très sombre et assez avant-gardiste. Au final, c'est une très grande réussite de la part d'un compositeur qui n'a plus rien à prouver mais qui le fait quand même, au risque de laisser des gens sur le carreau. A réserver aux plus téméraires d'entres vous.