Fausto Romitelli (né en 1963) étudie la composition avec Franco Donatoni à Sienne et à Milan, sa ville d'adoption. Il rejoint ensuite le cours de l'IRCAM à Paris grâce à l'intervention du compositeur Hugues Dufourt, qu'il a toujours considéré comme son maître, citant pour indépassable modèle son œuvre Saturne. Il a joui d'un succès d'estime durant sa courte vie (il est mort à l'âge de 41 ans), s'est vu attribuer quelques prix de composition et de nombreuses commandes institutionnelles (IRCAM, Fondation Gulbenkian, Fondation Royaumont…).
Son cycle pour ensemble Professor Bad Trip et ses deux dernières œuvres : Audiodrome pour grand orchestre et An Index of Metals, vidéo-opéra pour ensemble et électronique, réalisé avec le vidéaste Paolo Pachini, ont établi tardivement sa réputation de compositeur visionnaire, qui n'a cessé de s'amplifier après sa mort. Il avait été parfaitement conscient de son originalité, et du pas de côté qu'il effectuait par rapport à "l'académisme moderne", dont il aimait se moquer. On lui doit une saisissante mise en contact de l'écriture spectrale (harmonies-timbres, logique de la métamorphose, développement par vagues, avec l'expression hallucinée et violente du rock psychédélique. Le brio de son écriture pour guitare électrique, son instrument fétiche - écriture de connaisseur, idiomatique, sinueuse, véritablement "électrique" - est comme la signature et l'essence de son style.
Le squelette harmonico-rythmique de ses œuvres est généralement soigneusement construit et dessiné, souvent pris en charge par un groupe “continuo” d'un nouveau genre (piano ou synthétiseur, guitare électrique, contrebasse ou basse électrique). Le trait le plus spécifique de son effort artistique aura été de combiner cette harmonie, par ailleurs très sensuelle, très "française" (qui touche à la fin de son œuvre à une sorte de tonalité libre) avec une réflexion tour à tour critique et fascinée sur la saturation de la communication technologique, et la violence de son impact. L'usage des sons amplifiés et traités électroniquement est pensé chez lui sur un mode dramatique et sur-expressif, où il ne s'agit pas de glorifier la matière sonore, mais d'en révéler des propriétés quasi-monstrueuses.
La musique de Romitelli se développe par convulsions : le plus subtil, le plus évanescent des motifs musicaux se révélera toujours, au fil d'obsédantes répétitions, habité par un ennemi intérieur, virus ou Alien, qui le possède et le tord du dedans. Aucun son n'est neutre, aucun son n'est pur, aucun son n'est innocent : une déviation toujours le guette, un destin paroxystique. Une esthétique de la répétition et du processus, comme chez Ligeti parfois, ou chez Philippe Leroux, mais qui va systématiquement vers le pire. Ce que confirme sa conduite de l'harmonie, qui va toujours du propre au sale.
Ainsi Romitelli a-t-il développé une dimension critique vis-à-vis de l'époque, en même temps qu'un travail en pleine pâte avec le sound de son époque. L'assigner à la catégorie du "crossover" relèverait du malentendu. Il est l'un des rares compositeurs, à ce jour, à s'être montré capable de puiser en abondance dans les sonorités du rock et de la techno, et à les incorporer poétiquement aux ressources de la musique d'écriture, dont il a revendiqué l'usage avec une affirmation militante.
Fausto Romitelli est mort en juin 2004 à l'hôpital de Milan, des suites d'un long cancer.
Wikipedia
Zorn sort un album dédié a sa musique sur Tzadik : Anamorphosis, si le ramage vaut le plumage.....