Hop, un petit fil sur
Supersilent, qui le méritent bien après leurs 11 opus publiés cette dernière décenie.
Basiquement, le groupe se compose d'
Arve Henrikssen, à la trompette, aux voix & percussions, et même à la batterie depuis le départ tout frais de
Jarle Vespestad qui y officiait donc jusqu'à ces derniers mois, de
Ståle Storløkken aux claviers et de
Helge Sten (l'homme derrière le projet Deathprod) à l'électronique (il s'auto crédite comme "virus audio"), et sur quelques titres à la guitare et aux synthés.
Pour ce qui est de leur musique, on est assez loin du Nu jazz malgré l'origine scandinave du groupe & l'omniprésence de l'électronique, mais on a davantage à faire à un jazz
ambient organique, hyper-percussif & lorgnant de plus en plus sur le drone/noise. Une musique libérée de ses structures rythmiques & mélodiques et même d'ailleurs, pour les avoir vus il y a quelques jours, de ses premières racines jazz dont il ne reste plus aujourd'hui que l'esprit de création, le sens de l'osmose et de l'intensité.
La légende veut d'ailleurs que le groupe n'ait jamais rien composé, mais se retrouve simplement pour des sessions de quelques jours de création spontannée dont ils publient les meilleurs moments. En quelque sorte groupe de l'immédiat & de la "performance", ce qui donne à chacune de leurs apparitions un cachet unique, malgré au fond un recette invariable: une introduction lente à la trompette ou aux claviers qui viennent dresser quelques lignes mélodiques, que la batterie & les électroniques viennent ensuite peu à peu destructurer pour les emmener vers une séquence où tout le monde joue très fort en même temps, mais avec une cohésion étonnante, comme une espèce de processus biologique, qui se développe jusqu'au climax et finit par éclater en pleine tension.
Et pourtant après 11 albums de déclinaisons autour de cette même formule, eh bien la sauce continue toujours de prendre, et la recette de s'enrichir.
Ne connaît pour ma part que le moyeu central de leur discographie, à savoir les albums
5 (2001),
6 (2003) &
7 (2005), tous trois excellents, chacun avec son caractère propre,
5 proposant des longs développements atmosphériques, glaçants dans leur mécanique, mêlant à des explosions toujours mesurées quelques superbes passages mélodiques épurés à l'extrême, lesquels se retrouvent encore plus mis en avant sur l'opus suivant
6, album de synthèse et de concision simplement fascinant. Enfin,
7 présente l'intérêt majeur d'allier à l'expérience musicale la dimension visuelle, puisqu'il s'agit d'un film de plus de 100mn, minimalement monté et sans fioritures, qui ne donne rien d'autre à voir que l'essentiel: le groupe en pleine performance, ie. précisémment dans le contexte où il fait le plus sens. Majeur.
Du reste, je n'ai jamais eu l'occasion d'entendre leurs 3 premières publications compilées sous
1-3 (1998), mais sais qu'elles sont réputées les plus extêmes du groupe, les plus proches de la
noise. Quant-aux dernières directions du groupes, manifestement le pignon central s'est décalé de Helge Sten à Arve Henrikssen en même temps que celui-ci a récupéré la section rythmique - les deux titres que j'ai entendus en concert ont montré qu'ils ont quasi abandonné le filet mélodique, c'est-à-dire que même la trompette et les claviers sont utilisés comme instrument percussifs. Mais en même temps l'éclatement mélodique libère tout l'espace musical sans presque qu'il ne soit plus possible que les musiciens entrent en conflit les uns avec les autres, ce qui donne l'impression d'un magma vrombissant et certes bruitiste, mais jamais chaotique. Et qui remue les tripes. Mais en même temps l'impression d'un groupe en fin de vie qui a dit ce qu'il avait à dire, en tout cas à mon avis s'ils se cantonnent à cette formule à trois.
A signaler encore une excellente prestation "pirate" captée en 2008 au festival jazz de Moers, avec un invité de marque en la personne du guitariste
Terje Rypdal, qui est loin de se cantonner à de la figuration. Et avec un son excellent (d'autant que diffusé en lossless)