Tout est dit dans le titre ! Maintenant, laissez-moi vous expliquer le pourquoi du telle affirmation...
Tout commence dans le Texas des années 80. Les frères Abbott, Vincent et son jeune frère Darrell, passionnés de hard rock et eux-mêmes hard rockeurs en herbe, décident de se lancer dans l'aventure. Ni une, ni deux, Pantera est né.
Au départ, le line-up est fluctuant, et le style n'est pas plus stable, oscillant entre glam rock et heavy, avec toutefois un appétit, une énergie que l'on retrouve sur le premier album du groupe,
Metal Magic.
Auto-produit, il n'aura qu'une diffusion locale et discrète, malgré un beau succès d'estime parmi les amateurs du genre. Avec Terry Lee Glaze soutenant Darrell aux guitares, Donnie Hart au chant et Tommy Bradford à la basse, le groupe se produit dans les bars et clubs de la région, sans vraiment parvenir à décoller.
Au cours des deux albums suivants,
Projects in the Jungle en 84 et
I Am The Night en 85, guère plus enthousiasmants malgré de bonnes surprises (le très glam Like Fire, le très heavy I Am The Night - par exemple), le groupe évolue. Terry devient chanteur, laissant Darrell assumer seul le poste de guitariste, tandis que Rex Brown remplace Tommy Bradford à la basse. Cette période est cependant parfaitement improductive, Pantera demeurant l'exclave de ses influences, et il faudra l'arrivée d'un jeune chanteur de La Nouvelle-Orléans, Philip Anselmo, pour remettre le train en marche. Et le carburant est si efficace que ce train roulera pendant dix ans !
C'est le début de tout.
Power Metal sort en 89 et crée un buzz significatif. Les maisons de disques commencet à loucher de près sur ce groupe en plein essor qui déchaîne les foules. Mais rien n'arrive dans les mois qui suivent et une nouvelle fois, Pantera disparait plus ou moins de la circulation. C'est à cette période que Darrell auditionne pour le poste vacant de guitariste dans Megadeth, mais il insiste pour que Vinnie soit inclus dans le package, et après un refus formel, décide de rester avec son frangin et d'oublier Megadeth. C'est finalement Marty Friedman qui héritera du job.
Et la légende se met en marche. On raconte que Mark Ross, un des dénicheurs de talents du label Atco Records (il signera Dream Theater en 1991...), isolé en plein Texas par l'ouragan Hugo, échoue un soir dans un club et prend une vilaine baffe en voyant un quartet plutôt agité faire crier une fanbase déjà solide... Quelques coups de fils plus tard (notamment avec Walter O'Brien, qui deviendra le manager exclusif du groupe), le deal est en cours et sera signé peu après. Les rails sont posés, le train s'élance en 1990 avec un album qui deviendra culte :
Cowboys From Hell.
C'est la révélation pour le public. La puissance vocale de Phil, les fondations rythmiques de Vinnie et Rex et surtout, surtout, le jeu incroyable de Darrell font sensation. Ce dernier révolutionne tout simplement la guitare métal avec cet album. Riffs dévastateurs, solos splendides et torturés, sa présence imprègne l'album. Une tournée s'en suit, aux côté d'Exodus, Suicidal Tendencies, Prong et d'autres - notamment Judas Priest. A ce propos, il est intéressant de noter qu'après sa rencontre avec Anselmo, Rob Halford va se transformer en clone de celui-ci pour son sideproject Fight : même look, même style de chant... L'influence de Pantera commence à se faire ressentir.
A l'été 1991, Pantera est invité au Monsters of Rock de Moscou, et se produit devant 800.000 personnes aux côtés de Metallica ou encore AC/DC. Ce concert existe en vidéo, et des extraits sont présents sur les Vulgar Videos (rééditées sur le DVD "3 Vulgar Videos From Hell"). On retrouve certains d'entre eux sur le best-of du groupe, Reinventing Hell, sorti en 2003, mais pour les fans, sachez que l'intégralité du set existe sur l'E.P.
Alive and Hostile.
C'est le moment critique. Après un premier opus empreint d'une rage très adolescente, public et critiques s'attendent à un revirement commercial, le groupe étant signé sur une major. Et Pantera prend tout le monde de court avec un monstre au titre (et à la pochette !) explicites :
Vulgar Display of Power.
Féroce, sauvage, incisif musicalement comme au niveau des textes (enflammés) de Phil, c'est une réussite totale, citée encore aujourd'hui comme un des plus grands albums de métal de l'histoire. C'est aussi à cette époque que les gens découvrent vraiment les membres du groupe, et surtout leur incroyable capacité à enregistrer des albums, puis à les jouer live, en étant imbibés d'alcool (entre autres) au dernier degré. Cette spécificité en choque certains, en déstabilise d'autres (les groupes concurrents par exemple, incapables d'être aussi bons, même agens) mais rallie les metalheads du monde entier.
Les singles issus de l'album, à commencer par 'Walk' font le tour de la planète, bénéficient d'une intense diffusion dans tous les médias et au final, font un carton sans précédent. Le petit monde du heavy tremble sur ses bases, et les cadors du milieu (Metallica, Slayer et les autres) sont forcés de tendre l'autre joue devant une telle puissance - surtout en live, car les performances du groupe font sensation. Diamond devient Dimebag et offre au métal son premier guitar hero.
Et puis arrive la consécration. Une nouvelle fois, à peine la tournée entamée, les médias anticipent le retour du groupe et parlent d'une transition vers un style plus accessible, à la manière du Black Album de Metallica, qui, sorti à la même période, a montré que le heavy ne se limitait pas à un bourrinage insensé. Déterminé à ne faire aucun compromis, Pantera riposte à ces allégations en 1994 avec
Far Beyond Driven.
Enorme succès. L'album signe la première place du Billboard 200, une première dans l'histoire du métal. L'album est brutal, par moment malsain, mais frappe une nouvelle fois, principalement, pour son énergie incroyable et la virulence de son propos. La pochette originale sera d'ailleurs censurée (la vis que l'on connait tous ne s'enfonçait pas dans un crâne... Je vous laisse imaginer). Nouvelle tournée, et également premier sideproject pour Phil, qui signe avec de sacrés potes (issus de Corrosion of Conformity, de Crowbar et d'Eyehategod) le premier album de Down. Simple jam à l'origine, Down deviendra un groupe à part entière par la suite. Pantera se produit au Monsters of Rock de Donington, aux côtés de Sepultura, et conquiert définitivement le public européen.
En 1996 sort
The Great Southern Trendkill. La recette est la même que précédemment : excès en tous genres, grosse patate et textes virulents. Encore une fois, le succès est au rendez-vous. Mais le groupe commence à déraper peu à peu, victime d'un rythme de vie impossible (entre concerts, bitures, interviews, bitures et encore quelques bitures pour finir) et de divergences d'opinion perceptibles. L'enregistrement, supervisé par le grand Terry Date, est un calvaire et Phil, victime de problèmes de dos catastrophiques, commence à sombrer dans l'héroïne sans en faire part à ses collègues. L'ambiance est à l'orgie permanente, jusqu'à un triste soir de 97 où Phil fait une overdose. Son coeur s'arrête plusieurs minutes avant de finalement repartir. Une expérience qui va changer sa vision des choses et le pousser à expériementer dans le champ du metal extreme, avec de nombreux sideprojects tels que Eibon, Necrophagia ou encore Viking Crown. On notera qu'il n'est pas que chanteur, mais également et parfois simplement guitariste dans ces groupes. Malgré tout, Pantera profitera de cette tournée par ailleurs mémorable pour enregistrer un live officiel,
1O1 Proof.
Probablement l'un des plus grands live du genre - je n'en dirai pas plus, il faut l'avoir si on se dit fan du genre, au même titre qu'un Live After Death, qu'un AC/DC Live ou qu'un Decade of Agression. La pochette singe le carburant du groupe en imitant une étiquette de Jack Daniel's.
Les relations se déteriorent progressivement dans le groupe, Rex Brown rejoignant Phil dans Down et les frères Abbott essayant tant bien que mal de maintenir le train sur les rails. Pantera entre une dernière fois en studio à la fin du millénaire, et accouche de son opus testamentaire, le plus violent et nihiliste à ce jour, Reinventing The Steel.
Le son est énorme, monumental, et devient un exemple vivant de ce qu'on appelle le "gros son". L'album est une sorte de concept, une Passion de l'Antéchrist en quelque sorte, où l'on devine en filigrane l'existence toute entière du groupe, et sa descente volontaire aux Enfers. Phil est impérial, son chant tournant quasiment au growl tout en gardant ce timbre unique et cette puissance sans pareille. Dimebag délivre des riffs d'une efficacité singulière, soutenu par une basse montrueuse et par le jeu syncopé et précis de Vinnie.
La tournée qui suivra verra les derniers moments du groupe, ensemble. Ecourtée pour cause de 11 septembre, elle offrira tout de même de fabuleuses performances, comme celle du Ozzfest 2000 ou encore le mythique concert de Long Beach en janvier 2001, où Kerry King de Slayer montera sur scène pour accompagner le groupe sur Goddamn Electric puis Fucking Hostile. Hélas, rien n'y fait et en dépit d'une popularité qui n'a jamais été aussi élevée, le groupe se sépare. Phil est accaparé par ses sideprojects (Epoch, Southern Isolation, Superjoint Ritual) tandis que Darrell et Vinnie fricotent avec la country avec Gasoline, puis renouent avec le métal avec New Found Power dans un premier temps, puis Damageplan. Pantera est mort et enterré, les fans se lamentent, mais ainsi va la vie.
Cette histoire arrive bientôt à son terme - et hélas, de la pire façon possible. Le 8 décembre 2004, alors que Damageplan monte sur scène à Columbus, Ohio, un ex-marine à moitié fou enjambe le grillage, fraude l'entrée dans la salle, et monte sur scène avant d'abbatre froidement Dimebag de plusieurs balles en plein visage. Un fan, un membre du staff et une employée de la salle perdent la vie également, et d'autres encore seront blessés avant qu'un courageux officier de police, par chance présent aux alentours de la salle à ce moment, mette un point final à cette tragédie.
Ainsi périt Dimebag Darrell, le même jour que Lennon. Son enterrement sera un des plus rock'n roll de l'histoire : tout le gratin y sera, et Darrell s'en ira dans un cercueil Kiss, bardé de bouteilles de whiskey et de la guitare mythique de Van Halen, que ce dernier viendra déposer lui-même. Seul point noir, la veuve de Dime, passablement ingrate et incompréhensive, refusera à Phil le droit d'assister au service, et ce dernier passera trois jours dans un hôtel à pleurer son ami. Regrettable.
Aujourd'hui, Rex et Phil font tourner Down, Phil entretient toujours une passion pour la diversité en continuant à participer à de nombreux projets, et Vinnie, après avoir fondé son propre label, a refondé un groupe, Hell Yeah, qui a sorti un album pas mal l'an passé.
Pantera laisse à sa suite des millions de fans nostalgiques, et surtout un héritage musical conséquent. L'influence de ce groupe sur le métal de tous bords se fait toujours sentir aujourd'hui, et on peut véritablement dire qu'il a sa place au Panthéon des groupes mythiques, aux côtés des Slayer, Sepultura et autres Metallica.
Je vous laisse avec quelques images, et sur ce, je vais aller faire péter le son et descendre quelques binouzes. A la vôtre !