Certains ici connaissent déjà mon admiration totale (ils ne seront donc pas étonnés que j'ouvre ce topic
) pour ce metteur en scène canadien né en 1960, d’origine arménienne (ce qui joue un grand rôle dans son œuvre), metteur en scène mal connu au regard de l’excellence de ses films.
Il s’agit d’une œuvre cohérente, placée de façon constante sous le signe du
rituel, de l’obsession, du drame et de son exorcisme. A. Egoyan fait des films à
l’ambiance hypnotique, et tisse des histoires autour de plusieurs personnages reliés les un aux autres par des correspondances qui nous sont révélées petit à petit, selon un schéma à la fois compliqué et limpide.
Atom Egoyan est un
cinéaste voyeur, c’est une constante dans son oeuvre: il écorche ses personnages afin de les mettre complètement à nu. Nous, spectateurs devons ressentir ce qui se passe dans leur tête, même s’ils conservent toujours une
part de mystère. Les personnages sont toujours porteurs d’un passé lourd, ravageur, d’un
secret intime qui guide leurs actes, et que nous découvrons progressivement au long du film, mais jamais complètement.
Il y a pratiquement toujours un personnage clé, d’une
ambiguïté extrême, voyeur entre les voyeurs et doté d’un pouvoir particulier, sorte d’ange exterminateur, porteur lui aussi d’une tragédie, détective, agent d’assurance, avocat, contrôleur du fisc, il sert de révélateur aux autres personnages.
Atom Egoyan ne structure pas ses films de manière linéaire, mais selon un va et vient entre diverses expériences,
va et vient identique à celui du fonctionnement de la pensée humaine. Ce qui en fait une expérience à la fois chaotique et profondément personnelle.
Filmographie longs métrages :
-
1984 :
Next of Kin:
Suivant une psychanalyse pour cause de troubles avec ses parents, un jeune homme découvre des bandes vidéo sur lesquelles une famille arménienne épanche la douleur d’avoir dû abandonner son garçon. Il la retrouve et prétend être ce fils…
-
1987 :
Family Viewing:
Van, un jeune homme, habite chez son père et la maîtresse de ce dernier, un appartement empli de téléviseurs, magnétoscopes, et caméras. Le garçon visite souvent sa grand-mère, malade, à l’ hospice. Il y fait la connaissance d’Aline, dont la mère est sur le point de mourir. Lorsqu’elle s’éteint, Van échange les identités de la morte et de sa grand-mère. Mais un détective privé engagé par son père va découvrir le pot aux roses…
-
1989 :
Speaking Parts :
Clara regarde des images vidéos de son frère Clarence mort. Lisa travaille dans un hôtel avec Lance un figurant de cinéma dont elle est amoureuse. Clara rencontre Lance qui ressemble fortement à son frère…
-
1991:
The Adjuster:
Le personnage principal du film exerce la profession d’Adjuster, soit d’expert en sinistre, il est celui qui juge de l’importance des dommages auprès des compagnies d’assurance. Il a donc le pouvoir de changer le destin des personnes sinistrées. C’est une fonction de « juste », mais ce personnage terriblement ambigu est-il capable d’exercer une telle mission…?
-
1993:
Calendar:
film d’un genre unique mêlant documentaire/autobiographie/fiction/expérimental.
Le voyeurisme du cinéaste se retourne vers lui-même dans ce film où il se filme en train de filmer la progressive attirance de sa femme envers un autre homme au cours d’un voyage en Arménie.
-
1994:
Exotica :
son film le plus abouti, grandiose, avec un esthétisme à couper le souffle. Construit comme
un puzzle. Le film qui l’a fait connaître.
Un homme vient tous les deux jours dans un club de strip-tease où il demande à chaque fois à la même jeune fille de faire près de lui son fameux numéro de collégienne friponne. Plus tard, son travail de contrôleur fiscal l’amène à rencontrer un jeune qui tient une animalerie. Tous ces personnages ont des secrets enfouis au plus profond (parfois même à leur insu) et vont se retrouver mêlés les uns aux autres dans une intrigue mystérieuse. Egoyan nous révèle couche après couche, comme dans un strip-tease, les failles et les motivations de ses protagonistes
-
1997:
De beaux lendemains :
d’après le livre de Russel Banks, grand écrivain canadien. Une mise en scène d’une virtuosité quasi invisible, ce film est hanté par une lancinante douleur, palpitant d’une humanité fragile mais intense, tout en gardant cette parcelle de mystère (toujours chez Egoyan) liée aux déchirements indicibles.
-
1999 :
Le voyage de Félicia :
celui que j’aime le moins, le plus conventionnel.
-
2002 :
Arrarat :
film évoquant le génocide arménien, où histoires privées se mêlent à l’Histoire avec un grand H…
-
2005 :
La vérité nue :
une jeune journaliste se lance dans l’écriture de la biographie d’un des membres d’un duo comique célèbre 20 ans auparavant, qui a rompu après qu’on ait trouvé le cadavre d’une charmante dans la salle de bains de leur chambre d’hôtel…
Tous les films d’Atom Egoyan sont passionnants.
Mais le trio incontournable est : Exotica, De beaux lendemains, The Adjuster.
Si vous ne connaissez pas, et si vous aimez les films profonds, psychologiques, pervers et bouleversants à la fois... jetez vous sur ces films!
Un coffret contenant 8 de ses long métrages.